Cette histoire peu banale est une histoire vraie, bien sûr, racontée et écrite par Bill en 2000, un renommé pêcheur que certain d’entre-vous reconnaitrons peut-être s’ils sont des habitués des rivières de Bretagne sud. Il nous a malheureusement quitté trop tôt. Et, c’est avec tristesse et respect que nous publions son texte qu’il avait accepté d’écrire pour le site Canapeche.

« Pêcheur de saumons depuis l’âge de 11 ans, je pratique toujours à 51 ans ; je suis donc assez connu dans le milieu halieutique car j’ai pris plus de 200 poissons.
 J‘essayais depuis trois ans d’avoir une carte de pêche sur un parcours privé que je connaissais parfaitement mais c’était toujours un refus catégorique. Puis un beau jour, par relations, le propriétaire de la pêche privée accepta de me vendre une carte. La première semaine de pêche sur ce parcours, j’ai pris 3 saumons, un de 9 livres le mardi, le jeudi un de 8 livres et le vendredi un de 10 livres.

 Donc les pêcheurs du coin, extrêmement jaloux, « me faisaient la gueule », eux qui étaient encore bredouilles et qui me disaient que « j’avais pris ma part ». Cela ne m’empêcha pas d’y retourner le samedi et, comme le niveau d’eau avait monté, je connaissais un trou derrière un caillou qui se trouvait sous une branche où les saumons s’arrêtent toujours par eau « sale ». Je plaçais ma canne à vers montée sur un fil de 50 centièmes. Même pas le temps d’aller chercher mon ciré, je vois ma canne qui allait partir à l’eau. Je l’ai juste attrapée en  posant le pied et je l’ai prise en main. Mais sur mon 50 centièmes et ma canne de 5 m je n’arrivais pas à tenir ma prise qui passait sous un pont et me prenait 100 mètres de crin. Donc, j’appelais les pêcheurs en aval pour me donner un coup de main. Ils sont arrivés à sept. Je dis au premier de lancer sa cuiller sur ma ligne de façon à la récupérer pour la raccorder sur la sienne. Au bout de 10 lancers il n’avait pas réussi et surtout rien compris à la tactique. Alors, je lui demande de prendre ma canne et moi la sienne. Il avait du mal à tenir ma ligne et me disait que c’était sûrement un énorme poisson qu’ils avaient vu sauter quelques jours avant et qu’il sentait de gros coups de tête du poisson.

Avec sa ligne je récupérais la mienne en dessous du pont puis je la raccordais sur la sienne : Opération réussie mais plus bas il y avait une quinzaine d’arbres à passer pour descendre, car pas question de remonter le poisson dans un courant si fort.

Au bout de 3/4 d’heure de lutte et d’efforts avec la participation des sept copains, je réussis, après avoir été « calé » par les cailloux, à ramener ma prise, qui boudait dans le fond, vers la berge; mais comme l’eau était couleur « chocolat », on ne voyait rien. Je dis alors à mon gaffeur de mettre son croc dans l’eau 50 cm plus bas que mon émérillon qui se trouvait à cette distance de l’hameçon. Il réussit du premier coup et quelle surprise pour toute l’équipe : il sortit alors un cubitainer de 30 litres rempli d’eau .

Alors tout le monde fut mort de rire après cette bagarre, et comme le veut la tradition j’en étais quitte pour l’arroser avec deux bouteilles que nous avons appréciées. »

Jean Robert, dit « Bill » comme son père, magnifique pêcheur également …

Ayant fait lire cette histoire à Joëlle Caron, je reçu en retour cette merveilleuse réponse témoignant de son enchanteur esprit de romancière : « A propos de votre Saumon récalcitrant… vous n’avez pas dit, s’il n’y  en avait pas un dans le container et que vous avez pu le récupérer???  » Et bien ! énigme insoluble aujourd’hui …