Mardi 4 septembre 1923
– Luce : « Bonjour Jeanne, comment vas-tu ? »
– Jeanne : « Tu sais, Luce, depuis le mois de juin, j’ai quinze ans, et ma tante Philomène m’a toujours dit qu’à mes quinze ans, elle accepterait que je la rejoigne à Jersey. »
– Luce : « Oui, c’est pour cette raison que je voulais te parler. Tu sais que mon intention est aussi d’y rejoindre ma tante Marie Louise. Comme je pense que je vais perdre mon travail, je crois que le moment est venu. De plus, tante Marie Louise, la sœur de ma mère Julia, et son époux Joseph ROPARS, ont atteint la cinquantaine, et pour eux, la gestion du South Western Hôtel devient difficile. Depuis le décès de leur seul fils, le petit Louis, à l’âge de six ans, ils n’ont plus d’héritier et souhaitent garder l’hôtel dans la famille. »
– Jeanne : « Maintenant que nous allons avoir nos passeports, tout va s’accélérer. Ma soeur Philomène arrive le 19 avec mon autre tante Augustine accompagnée de son mari Jean BERTON qu’elle a épousé à Jersey en 1918. Je suis heureuse de les revoir et de connaître enfin mon oncle et ma cousine Simone. »
– Luce : « C’est vrai que ta tante Philomène, la demi soeur de ton père est à Jersey depuis longtemps déjà. C’était une amie de ma tante Marie Louise et elles sont parties toutes les deux il y a plus de dix ans maintenant. Philomène ne s’est toujours pas mariée ? »
– Jeanne : » Non, et maintenant elle a 45 ans, alors j’imagine qu’elle finira sa vie vieille fille. C’est une excellente cuisinière et elle travaille pour des grandes familles. Elle m’a écrit qu’elle voyait souvent Marie Louise car elle habite Brooksland, Trinity Hill à St Helier, non loin du South Western Hôtel, qui est situé Caledonia Place. »
– Luce : « Bien sûr, Jeanne, pense un instant à cette éventualité fascinante : en choisissant de partir toutes les deux après nos tantes, nous deviendrons les deux seules familles de Quimperlé à entreprendre cette migration vers Jersey. D’un côté, les LE DREN-COLLIEC me concernant, et de l’autre, les PERENNOU dans ton cas, même si ta tante Philomène appartient à la lignée des LE MESTE. C’est une perspective singulière qui liera nos destins familiaux dans cette nouvelle aventure. »